Besoin, désir et envie

En règle générale, les économistes partent du principe que les désirs humains sont illimités. Or, si tout désir se traduit par une demande qui appelle ensuite d’une façon ou d’une autre, une offre

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Sur le marché, comment survivre sur une planète limitée? Ne devons-nous pas nous rendre à l’évidence qu’une limite possible du système capitaliste est bien celle-ci que, à l’image du stress hydrique arrivant vers 2050, il faut ou bien des pénuries locales, ou bien trouver le moyen de nous passer (renoncer) à certains désirs?

Une solution m’est venue à l’esprit lorsque j’ai pensé à nos animaux de compagnie qui nous sont si proches et dont nous sommes de lointains cousins : ne faudrait-il pas au minimum, exactement comme nos animaux s’arrêtent seuls de boire quand ils n’ont plus soif, s’arrêtent seuls de manger lorsqu’ils n’ont plus faim, apprendre à faire la différence entre les désirs (illimités et parfois superflus) et les besoins (limités et nécessaires), de sorte à ne s’attacher qu’aux derniers et ignorer ceux des premiers qui seraient superflus? Les animaux semblent n’avoir que certains besoins, au delà desquels ils ne cherchent rien de plus, et cela suffit à leur bonheur!

Pour en avoir le cœur net, il faudrait faire une distinction claire entre besoin, désir et envie, même si dans l’usage nous utilisons souvent ces trois mots de façon interchangeable, le problème du capitalisme n’est-il pas que sous la bannière du désir et du plaisir/profit, nous ne faisons plus de différence entre le nécessaire et le superflu? Dans le fond, n’avons-nous pas perdu le sens de ce qui est nécessaire et de ce qui est superflu pour tout traiter sous l’angle du besoin?

Un besoin correspond et dérive directement de notre nature profonde, il ne correspond d’ailleurs pas à un objet concret mais peut être satisfait de multiples manières tout en revenant de façon cyclique et nécessaire. Ils semblent clairement limités. Nous avons par exemple la faim, la soif, le sexe, le sommeil, la reconnaissance, et en règle générale tout ce qui peut se retrouver dans la pyramide de Maslow.

Une envie est une façon particulière de répondre à un besoin, c’est pourquoi elle est elle-même temporaire et non-nécessaire (même si le besoin derrière est bien réel et nécessaire). Si j’ai soif, alors je peux avoir envie d’eau (ou autre chose), et je ne vais tout de même pas me maintenir constamment au niveau du seuil de déshydratation pour attendre de boire! Néanmoins je peux généralement différer mon envie de boire de l’eau, ce qui accroîtra mon désir d’eau, mais sans me faire pour autant mourir.

Et le désir dans tout ça? Il me semble que le désir soit la force du sentiment de manque, et lié à une envie en particulier. Il possède donc une dimension parfois purement psychologique. Il correspondrait à un objet concret dont nous avons alors l’impression que s’en emparer nous enlèverait ce sentiment de manque.

La cigarette et toutes les addictions correspondraient en fin de compte, au niveau psychologique, à notre incapacité à distinguer entre notre envie et notre besoin, et donc à traiter notre désir sous l’angle du seul besoin : ce serait une envie dont la satisfaction nous parait immédiatement nécessaire, ou encore un désir dont la possession de son objet nous paraît une nécessité vitale. Le système capitaliste en confondant sciemment les deux (et en considérant uniquement les désirs) renvoie le tout à la responsabilité du consommateur alors que tout est fait pour brouiller les cartes. Peut-être cela permet-il aussi de comprendre la prolifération des comportements et addictions dans le monde moderne, signe du dérèglement des consciences.

Nous devrions donc réapprendre à identifier derrière chaque envie particulière le besoin sous-jacent (p.ex. si j’ai envie d’une belle voiture, c’est par besoin de reconnaissance / si j’ai envie de jouer dans un casino, c’est par besoin de justice doublée du sentiment que ma vie est injuste / …) et ainsi devenir plus libre de nos envies, puisque de cette façon nous pouvons différer notre envie, ou choisir un autre objet plus judicieux et éthiquement moins discutable pour combler notre besoin initial. Et ainsi vivre simplement pour que d’autres puissent simplement (sur)vivre.

Perso :

J’ignore quelle serait la nature profonde de l’homme (ou même la mienne). Besoin envie et désir empiètent les uns sur les autres, une envie peut devenir un désir puis un besoin etc…

J’ai une pensée à apporter à ce genre de débat : je crois que quand l’homme est heureux, il n’a besoin de rien d’autre que ce qui fait son bonheur.

Peut-être qu’a partir de là, on peut avancer un tout petit peu…

Philho Thérapie le 13.05.2019